Évaluer les apprentissages : une vue d’ensemble
Mis à jour le 8 novembre 2024
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*Les étapes de planification ont été légèrement revues depuis l’atelier.
Dès le début de la conception d’un cours, l’évaluation des apprentissages devrait faire partie du processus de réflexion. Prendre le temps de prévoir sa stratégie d’évaluation assure une plus grande cohérence entre les objectifs du cours, les contenus, les activités d’apprentissage et les méthodes d’évaluation. Il en résulte une plus grande validité de l’évaluation. Les sections qui suivent expliquent comment bien planifier l’évaluation des apprentissages dans un cours, et exposent quelques bonnes pratiques en matière de correction et de rétroaction.
Pourquoi évaluer les apprentissages?
🎯 Vérifier l’atteinte des objectifs du cours
L’évaluation des apprentissages vise à vérifier si chaque étudiant·e a atteint (et si oui, dans quelle mesure) les objectifs du cours. À terme, cela permet de déterminer si la personne réussit le cours ou y échoue, et ultimement, si elle obtient son diplôme, avec ce que cela implique, notamment pour la suite de son parcours académique et professionnel.
🧩 Renforcer les apprentissages
Une évaluation est également une occasion pour les étudiant·e·s de renforcer leurs apprentissages. En effet, les connexions neuronales qui se créent dans le cerveau lorsqu’on apprend se développent et se renforcent au fur et à mesure qu’on les active. Or, une évaluation (et la révision qui la précède, le cas échéant), parce qu’elle mobilise les apprentissages, permet d’activer les connexions neuronales, et donc de renforcer les apprentissages.
👍 Offrir de la rétroaction
Les évaluations, qu’elles soient formatives ou sommatives, sont aussi des occasions pour les étudiant·e·s d’obtenir de la rétroaction sur leurs apprentissages. Cela leur permet de corriger d’éventuelles erreurs de compréhension, d’identifier (voire de combler) certaines lacunes dans leurs apprentissages et d’être valorisé·e·s pour leurs apprentissages réussis. La rétroaction est donc une source de correction (d’erreurs, de lacunes), mais aussi une source de motivation à répéter les réussites.
👩🏫 Réguler son enseignement
Les productions des étudiant·e·s ne font pas que renseigner sur leurs apprentissages. Elles donnent aussi de précieuses pistes d’amélioration à la personne enseignante. Par exemple, si une question d’examen a mal été réussie par une majorité d'étudiant·e·s, la personne enseignante sera amenée à se questionner : « La question était-elle bien formulée? Était-elle cohérente avec les objectifs du cours? La façon dont j’ai présenté la matière en lien avec cette question était-elle adéquate? Ai-je proposé des activités d’apprentissage pertinentes? La rétroaction fournie était-elle suffisante? Devrais-je revenir sur cette matière? ». Ces questions l’aideront à apporter des améliorations à son enseignement, et lui permettront de progresser dans le développement de ses compétences professionnelles.
Planifier l’évaluation des apprentissages en 5 étapes
Objectifs ➡️ Modalité d’évaluation ➡️ Critères et indicateurs ➡️ Pondération ➡️ Consignes
1. Analyser les objectifs spécifiques du cours
Les évaluations doivent permettre de déterminer à quel degré les objectifs d’apprentissage ont été atteints. Il est donc essentiel d’avoir préalablement identifié ces derniers (voir l’article sur la planification de cours). Il peut également être profitable d’avoir identifié leur niveau taxonomique.
2. Déterminer la modalité d’évaluation
On détermine ensuite ce qu’on doit demander aux étudiant·e·s d’accomplir afin de nous permettre de vérifier si les objectifs ont été atteints. À cet effet, le niveau taxonomique des objectifs peut nous être utile. Par exemple, si un objectif en est un de mémorisation, on cherchera une tâche qui implique de se rappeler une information, pas de l’appliquer ou de l’analyser. On doit aussi prendre en considération la durée de la tâche, ainsi que le matériel et les compétences particulières (propres à la tâche, sans lien avec les apprentissages évalués) qu’elle requière pour s’assurer qu’il soit réaliste de l’inclure dans une évaluation. Par exemple, si on souhaite qu’un travail soit rendu sous la forme d’un documentaire vidéo, on doit s’assurer que les étudiant·e·s disposent du temps, de l’équipement, des logiciels et des compétences nécessaires pour faire des tournages et du montage.
Entraînement
Idéalement, les étudiant·e·s devraient avoir eu l’occasion de se familiariser avec les tâches choisies pour les évaluations avant que celles-ci n’aient lieu. Rappelons que l’évaluation vise à vérifier l’atteinte des objectifs d’apprentissage, pas la capacité à interpréter les consignes d’une tâche précise. Par ailleurs, s’il semble facile, pour la personne experte, de mobiliser un apprentissage dans un nouveau contexte, il n’en est pas de même pour la personne novice. Il est donc souhaitable de proposer, tout au long de la session, des activités d’apprentissage (voir l’article à ce sujet) qui comportent des tâches semblables à celles employées dans les évaluations.
Ces tâches peuvent s’inscrire à l’intérieur d’un examen (donc en une seule séance de travail d’une durée limitée), ou d’un travail long (donc en plusieurs séances de travail réparties sur plusieurs jours), selon leur nature et leur durée.
L’examen
La forme la plus connue et courante d’examen est le questionnaire écrit. Il peut être administré en classe, ou à distance (dans le cadre d’un cours à distance). Il peut être imprimé ou en format numérique, ou même être intégré dans l’environnement numérique d’apprentissage (Moodle).
Quand le contexte le permet, on peut aussi opter pour un examen oral. Il s’agit d’une rencontre individuelle entre la personne enseignante et chaque étudiant·e. L’étudiant·e doit répondre oralement et spontanément aux questions de la personne enseignante. Cette dernière peut relancer l’étudiant·e pour l’amener à clarifier sa réponse et ainsi bien cerner les apprentissages réalisés. L’examen oral fait généralement suite à la réalisation d’une autre tâche, et permet de vérifier que les apprentissages visés ont bien été réalisés. Cela permet, par exemple, de s’assurer que tous les membres d’une équipe ont bien compris l’intégralité du travail qu’ils ont fait, même s’ils se sont divisé le travail.
Enfin, l’examen peut aussi prendre la forme d’un examen pratique, où les étudiant·e·s sont observé·e·s pendant la mise en pratique de leurs apprentissages (par exemple dans le cadre d’une simulation).
Le travail long
La forme du travail long dépend de la nature des tâches qui y sont associées. Il peut être réalisé de manière individuelle, ou en équipe. Il peut être bénéfique de le scinder en étapes s’il est particulièrement long ou complexe, de façon à ce que les étudiant·e·s obtiennent de la rétroaction en cours de route leur permettant de bien orienter leurs efforts. Il y a plusieurs façons de rendre compte d’un travail long :
Rapport écrit;
Article de blogue;
Exposé oral;
Communication par affiche;
Baladodiffusion;
Vidéo;
Etc.
En équipe?
Le travail d’équipe, lorsqu’il est bien conçu et bien encadré, favorise un approfondissement des apprentissages grâce aux interactions qu’il permet (exposition à des idées nouvelles, questionnement, explication, justification, argumentation…). Il pose cependant des enjeux éthiques dans le cadre d’une évaluation sommative (Proulx, J., dans Leroux, J. L. (dir.), 2015). En effet, une note collective ne reflète souvent pas adéquatement les apprentissages, forcément individuels, de chacun des membres de l’équipe. Pour minimiser ce problème, il est utile de pouvoir identifier la contribution de chacun des membres de l’équipe, et éventuellement d’accorder une partie de la note de manière individuelle, en fonction de cette contribution. Il est également recommandé de s’assurer que les contributions des membres de l’équipe soient réellement mises en commun; c’est-à-dire que tous les membres aient pu s’en approprier le contenu. Pour ce faire, on peut prévoir du temps en classe où les équipes seront amenées à faire une mise en commun en bénéficiant de l’encadrement de la personne enseignante.
3. Préciser les critères d’évaluation et les indicateurs de réussite
À partir des objectifs spécifiques, on établit les critères d’évaluation. Les critères d’évaluation précisent le plus clairement possible comment chaque objectif devrait se manifester dans la tâche demandée. Par exemple, si, dans un cours d’informatique, un des objectifs spécifiques est de programmer un algorithme simple et que la tâche est de coder, les critères d’évaluation pourraient être :
Traiter les données d’entrée et de sortie de manière appropriée;
Utiliser correctement les variables;
Utiliser correctement les opérateurs;
Employer adéquatement les conditions;
Employer adéquatement les boucles.
On remarque que les critères sont cohérents avec le niveau taxonomique de l’objectif. Ils contiennent aussi un qualificatif (« correctement », « clairement », « exactement », « précisément », « de manière pertinente », « de manière cohérente »…) venant préciser ce qui est attendu de la part des étudiant·e·s. De plus, ils sont distincts les uns des autres (ils ne se recoupent pas) et ils sont exhaustifs (ils couvrent entièrement l’objectif).
Les indicateurs de réussite, quant à eux, sont des éléments observables permettant de déterminer si la tâche a été réussie au regard des critères d’évaluation. Dans le cas d’une question à choix multiples, par exemple, l’indicateur est simplement l’adéquation entre la réponse fournie et la réponse attendue. Pour des tâches plus complexes, il y aura parfois plusieurs indicateurs pour un même critère, et plusieurs niveaux de réussite possibles.
Ainsi, si on reprend le critère donné en exemple ci-haut « Utiliser correctement les variables », les indicateurs pourraient être 1) de déclarer les variables, 2) de sélectionner le bon type de variables et 3) de respecter la syntaxe du langage de programmation dans l’utilisation des variables. S’il y a trois variables dans le travail et que l’une d’elles n’est pas déclarée, le tiers des points serait perdu pour le premier indicateur.
Pour les travaux longs, il s’avère souvent préférable de présenter les critères et les indicateurs à l’intérieur d’une grille d’évaluation. Pour en savoir plus sur cet outil, on peut consulter cette ressource.
4. Établir la pondération
On établit ensuite la pondération associée à chaque objectif en fonction de l’importance qui lui a été accordée dans le cours. Par exemple, un objectif qui aurait été abordé pendant 3 séances de cours devrait avoir une pondération plus élevée qu’un objectif auquel seule une séance de cours aurait été consacrée. Cette pondération peut ensuite être déclinée dans les critères d’évaluation de chaque objectif.
5. Rédiger les consignes ou questions
Enfin, on peut rédiger les consignes ou les questions de notre évaluation. Celles-ci doivent être claires et précises. Toutes nos attentes doivent être explicitées. Il est même souhaitable de joindre la grille d’évaluation aux consignes. C’est également à cette étape de la planification qu’on spécifiera, dans le cas d’un travail long, le format attendu du travail, la date et les modalités de remise.
Correction et rétroaction
Correction
Au moment de corriger les évaluations, il importe de se référer aux critères d’évaluation et aux indicateurs de réussite préalablement établis afin d’éviter d’octroyer des points pour des éléments ne faisant pas partie des objectifs d’apprentissage. Par exemple, à moins d’évaluer précisément l’aisance à l’oral, on ne doit pas octroyer de points pour l’intonation, le volume de la voix ou le débit de parole dans le cadre d’un exposé oral.
La correction doit également être équitable. Les mêmes critères doivent s’appliquer à l’ensemble des étudiant·e·s avec la même rigueur, et la qualité de la rétroaction doit être constante. Quelques stratégies peuvent être mises en place pour déjouer nos biais inconscients et éviter un effet de fatigue lors de la correction, notamment :
Ne pas regarder le nom inscrit sur la copie qu’on corrige;
Corriger la même question à développement (ou la même section de travail long) sur toutes les copies avant de passer à la suivante;
Varier l’ordre des copies à corriger d’une question à l’autre;
Corriger dans des conditions favorables (éviter les séances de correction trop longues ou trop tardives, bien s’alimenter et s’hydrater, maintenir une bonne hygiène de sommeil, etc.).
Une fois les évaluations corrigées au regard des objectifs du cours, on retirera éventuellement des points conformément à ce qui est prévu au plan de cours pour la qualité de la langue et les retards de remise.
Rétroaction
Comme mentionné plus haut, la rétroaction permet aux étudiant·e·s de corriger d’éventuelles erreurs ou lacunes dans leurs apprentissages, et d’être valorisé·e·s pour leurs apprentissages réussis. On doit donc veiller à ce que la rétroaction ne soit pas que négative. Elle doit aussi souligner les bons coups de l’étudiant·e.
Pour maximiser l’impact de la rétroaction (Crisp et Bonk, 2018), on cherchera également, dans la mesure du possible, à ce qu’elle soit :
donnée le plus rapidement possible après l’évaluation;
détaillée;
personnalisée.
Considérations importantes
Mesures d’accommodement
Les étudiant·e·s ayant des besoins particuliers ont droit à des mesures d’accommodement. Par exemple, certaines personnes ont droit à du temps supplémentaire ou au logiciel Antidote pour compléter un examen. Ces mesures sont encadrées par les Services à la communauté étudiante. Pour en savoir plus, on peut consulter leur page web ou les contacter.
Diversité, flexibilité, inclusion
Les étudiant·e·s ont des profils et des parcours variés, pour ne pas dire uniques. Chacun·e a ses intérêts, ses motivations, ses forces, ses défis, ses habitudes, son bagage de connaissances, ses compétences, etc. Varier ses méthodes d’évaluation contribue ainsi à rendre les cours plus inclusifs. En effet, en proposant des moyens d’expression divers, on maximise la probabilité de rencontrer les forces de chaque étudiant·e, mais également d’offrir des défis stimulants.
On peut aussi envisager de laisser chaque étudiant·e choisir entre plusieurs sujets ou plusieurs formats de remise pour un travail, ce qui favorise la performance, la motivation et l’autonomie. Par exemple, un travail long pourrait être présenté dans un rapport écrit ou un exposé oral, au choix de l’étudiant·e, pourvu que les critères d’évaluation soient les mêmes.
Normes départementales
Des normes propres à chaque département peuvent encadrer l’évaluation des apprentissages dans les cours. Par exemple, elles peuvent préciser un nombre d’évaluations minimal, la pondération maximale pour une évaluation, une date avant laquelle un certain pourcentage de la note doit être remis, les points pouvant être enlevés en raison de la qualité de la langue, etc. Les personnes coordonnatrices des départements sont en mesure de fournir ces informations.
Guide de présentation d’un travail écrit
Les personnes enseignantes peuvent exiger que les travaux écrits qui leur sont rendus respectent un certain format. À cette fin, l’UQAT a développé des guides et des gabarits de rédaction pour les travaux écrits de premier cycle et de cycles supérieurs.
Intégrité intellectuelle
Même la meilleure évaluation qui soit ne sera pas valide si elle n’est pas réalisée avec intégrité. Pour éviter ou à tout le moins minimiser le risque de tricherie, les personnes enseignantes peuvent par exemple :
Expliquer et illustrer la notion de plagiat, discuter avec les étudiant·e·s de l’importance de l’intégrité intellectuelle, leur proposer des ressources pour apprendre à citer correctement leurs sources;
Proposer des évaluations cohérentes avec les objectifs du cours et les activités d’apprentissage réalisées pour lesquelles les étudiant·e·s ont pu avoir de la rétroaction;
Privilégier les examens avec surveillance, lorsque c’est possible;
Ne pas réutiliser le même questionnaire d’une année à l’autre;
Varier l’ordre des questions d’examen d’une copie à l’autre;
Questionner les étudiant·e·s sur leur démarche.
Demande de révision de note et conservation des copies d’évaluation
Les copies d’évaluation des étudiant·e·s devraient être conservées après la fin de la session advenant qu’une demande de révision de note ne soit déposée. Elles doivent cependant être détruites un an après la fin de la session, si elles n’ont pas été remises aux étudiant·e·s.
Autoévaluation et évaluation par les pairs
Les activités d’autoévaluation et d’évaluation par les pairs, lorsqu’elles sont bien préparées et bien encadrées, permettent notamment aux étudiant·e·s d’approfondir leurs apprentissages et de développer leur regard critique, leur autonomie et leur empathie. Elles prennent souvent la forme d’un portfolio, d’un journal de bord, d’un dossier d’apprentissage ou d’une grille d’évaluation. Ces activités sont généralement formatives.
La prudence est de mise si on opte pour une activité sommative. En effet, les étudiant·e·s ont tendance à se surévaluer ou à se sous-évaluer (Tejeiro, R. et al., 2012). La proportion de la note attribuée par les étudiant·e·s devrait être limitée et la personne enseignante devrait se réserver un droit de véto en cas de différence trop marquée entre le jugement des étudiant·e·s et le sien.
Lorsqu’un cours comporte des objectifs liés à la métacognition, à la réflexivité ou à l’évaluation, la personne enseignante peut évaluer les activités d’autoévaluation et d’évaluation par les pairs. La note attribuée correspond alors au jugement de la personne enseignante sur le travail d’évaluation réalisé par les étudiant·e·s, et non au jugement porté par les étudiant·e·s sur leur propre travail ou celui de leurs pairs.
Le Service de pédagogie universitaire et de formation à distance (SPUFAD) de l’UQAT peut vous accompagner dans l’élaboration de vos activités d’évaluation-apprentissage.
Références
Anderson, L. W. et Krathwohl, D. R. (2001). A Taxonomy for Learning, Teaching, and Assessing: A Revision of Bloom's Taxonomy of Educational Objectives. Longman.
Bourgeois, E. et Nizet, J. (2005). Apprentissage et formation des adultes (3e édition). Presses Universitaires de France.
CAST (2018). Universal Design for Learning Guidelines version 3.0. http://udlguidelines.cast.org
Crisp, E. A. et Bonk, C. J. (2018). Defining the learner feedback experience. TechTrends, 62(6), 585-593. https://doi.org/10.1007/s11528-018-0264-y
Leroux, J. L. (dir.). (2015). Évaluer les compétences au collégial et à l’université : un guide pratique. Association québécoise de pédagogie collégiale.
Masson, S. (2020). Activer ses neurones pour mieux apprendre et enseigner. Odile Jacob.
*voir aussi sa chaîne YouTube
Roussel, Chantal (2019). Autoévaluation et autorégulation : deux habiletés favorables aux apprentissages en profondeur. Le Tableau, 8(1).
Tejeiro, R. et al. (2012). Summative self-assessment in higher education: implications of its counting towards the final mark. Electronic Journal of Research in Educational Psychology, 10(2), 789-812. https://doi.org/10.25115/ejrep.v10i27.1528
Rédigé par Caroline Sigouin